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Dossiers et Mails personnels : Pourquoi mon employeur ne peut pas les consulter ? Par Maître SHIRKHANLOO, Avocat en Droit du Travail à Toulouse.

Le 23 janvier 2017
Dossiers et Mails personnels : Pourquoi mon employeur ne peut pas les consulter ? Par Maître SHIRKHANLOO, Avocat en Droit du Travail à Toulouse.

L’employeur a-t-il un droit de regard sur les documents et mails personnels du salarié ?

En d’autres termes, le principe du « secret des correspondances » est il applicable sur le lieu de travail ?

A l’instar du Code Pénal, lequel sanctionne la violation du secret des correspondances (Article 226-15 et 432-9 du Code Pénal), le Droit du Travail a instauré, au profit du salarié, le droit à la confidentialité des correspondances et des documents privées qu’il seraient susceptible de recevoir sur son lieu de travail ; ce principe étant un corollaire à celui du respect de la vie privée.

Ainsi, si dans le cadre de son pouvoir de Direction, l’employeur ait en mesure de « contrôler » l’activité du salarié au travail, il ne saurait exercer ce pouvoir de manière absolue afin de s’immiscer dans la vie privée du salarié.

Autrement dit : dès que la correspondance ou le fichier litigieux comporte une mention relative à son caractère personnel, l’employeur ne peut en prendre connaissance sans avoir à respecter une procédure particulière.

Ainsi, pour chaque type de correspondance ou fichier (mails, lettre, fichier informatique ou SMS), l’employeur doit respecter des conditions strictes avant de décrocher le fameux sésame qui lui permettra de lever le secret.

Le point avec Maître SHIRKHANLOO Avocat en Droit du Travail :

- Les fichiers personnels stockés sur le disque dur de l'ordinateur du salarié :

Dès lors que le salarié a identifié comme personnels des fichiers de son disque dur, l'employeur ne peut procéder à leur ouverture que s'il respecte deux conditions alternatives :

- le salarié doit être présent ou du moins informé ;

- et à défaut, il faut l'existence d'un risque ou d'un événement particulier pour l'entreprise.

Les fichiers créés par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel et peuvent donc être ouverts par l'employeur hors la présence du salarié, sauf si le salarié les identifie comme personnels.

Si le salarié a identifié les fichiers comme « personnels » l'employeur ne peut pas exercer son contrôle en dehors de la présence du salarié (Cassation Sociale, 18 oct. 2006, n° 04-48.025 ; Cassation Sociale, 18 oct. 2006, n° 04-47.400).

Toutefois, ne sont pas considérés comme personnels et peuvent donc être ouverts par l'employeur en l'absence du salarié, les fichiers classés dans un répertoire portant le prénom du salarié.

En effet, le fait de donner son prénom à un répertoire ne signifie pas que les fichiers contenus dans ce répertoire soient identifiés comme personnels (Cassation Sociale, 8 déc. 2009, n° 08-44.840).

IL en est de même pour les clés USB, même en l'absence du salarié, l'employeur peut avoir accès aux fichiers contenus dans la clé USB du salarié connectée à son ordinateur professionnel, dès lors que ceux-ci ne sont pas identifiés comme personnels (Cassation Sociale, 12 févr. 2013, n° 11-28.649).

- Les emails et correspondances du salarié :

La problématique de l'usage de la messagerie électronique par les salariés fait écho au principe de la correspondance privée.

En effet, le salarié est protégé par le principe du secret des correspondances émises par la voie des télécommunications, dont la violation tombe sous le coup des articles 226-15 et 432-9 du Code pénal.

Ainsi, les courriers adressés par le salarié à l'aide de l’ordinateur professionnel mis à disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel.

L'employeur est alors en droit de les ouvrir hors la présence de l'intéressé, sauf si celui-ci a identifié ces fichiers comme étant personnels.

Tout comme les fichiers stockés sur le disque dur, dès lors que les courriers figurant sur la boîte électronique du salarié ne portent aucune mention les faisant apparaître comme personnels, ils peuvent être ouverts par l'employeur (Cassation Sociale, 15 déc. 2010, n° 08-42.486).

Toutefois, soulignons que si l'employeur peut toujours consulter les fichiers qui n'ont pas été identifiés comme personnels par le salarié, il ne peut les utiliser pour le sanctionner s'ils s'avèrent relever de sa vie privée (Cassation Sociale, 5 juill. 2011, n° 10-17.284).

Dès lors que l'employeur a accédé légitimement au contenu du courriel du salarié, ce dernier ne peut se retrancher derrière une quelconque atteinte à leur vie privée.

L'employeur peut, dans ce cas, prononcer une sanction disciplinaire, sous réserve néanmoins que ce contenu soit en rapport avec l'activité professionnelle.

Par exemple, un mail, ayant été envoyé par le salarié au temps et lieu de travail et étant en rapport avec son activité professionnelle, ne revêt pas un caractère privé.

Ainsi les insultes qui y étaient proférées et l'annonce d'une nouvelle absence non autorisée qui y était faite, alors même que le salarié venait de faire l'objet d'une mise à pied pour le même motif, justifiaient la rupture immédiate de son contrat (Cassation Sociale, 2 févr. 2011, n° 09-72.313).

Seule exception, dans le cas de danger menaçant l'entreprise, l’employeur pourra justifier d'un contrôle nécessaire des fichiers ou courriers électroniques.

Notamment en cas d’acte de terrorisme ou bien de danger économique.

Dans ces hypothèses, le contrôle exercé devra être proportionné au but recherché et justifié par la nature de la tâche à accomplir : tout dépendra donc de l'intensité du danger, du dommage éventuel, de la personnalité et des fonctions des salariés plus spécialement visés.

- Les SMS reçus par le salarié sur son portable professionnel

Les SMS envoyés ou reçus par le salarié au moyen du téléphone mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel, en sorte que l'employeur est en droit de les consulter en dehors de la présence de l'intéressé, sauf s'ils sont identifiés comme personnels.

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